C'était lui ou c'était elle

Je sais à peu près comment ils ont fait

Ils sont à plusieurs sous la même peau

L'un recouvre l'autre

Mais l'autre ne se laisse pas faire

Ils se bousculent tous les deux

autour de cette table à la nappe blanche


Et comme

L'un se cache dans la maison accrochée aux glycines

L'autre fuit sur les pavés qui glissent par ce jour de pluie


Je sais que l'un et l'autre n'en parleront pas

Ils préfèrent regarder les tortues qui pondent la nuit en pleurant

ou nager derrière les lamantins dans la forêt humide et moite.


Lui a grandi en un seul jour de septembre. C'était sous le tilleul

aux herbes hautes.

Elle est partie très tôt. Elle portait un enfant dans le dos attaché

par une écharpe aux couleurs vives


Ils se parlent, je me tais


Il y a une odeur de viande rôtie et le bruit sourd de leur silence.


Ils sont bien là, à plusieurs sous la même peau dans cet ouragan

qui fait rage,

ce matin d'automne,

assis à la même table,

à se regarder,

à se toucher

à s'aimer


Et moi ailleurs, ici, hier et maintenant.

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